Archives pour la catégorie Culture photo

Les photographies du magazine LIFE au service de notre apprentissage du médium

General Field Marshall von Bock following the French/German armistice negotiations. (LIFE) Compiegne, France // June 21, 1940 // Hugo Jaeger
General Field Marshall von Bock following the French/German armistice negotiations. (LIFE) Compiegne, France // June 21, 1940 // Hugo Jaeger

Je ne reviendrai pas sur la genèse et la mort du célèbre magazine LIFE. Par contre, du haut de sa légende, ce sont les reportages photographiques qui m’intéressent dans cet article.

Se construire une culture photographique est une prolongation de mon intérêt pour le médium photo. Il existe des initiatives intéressantes sur Internet qui aident à la construction d’une certaine culture liée à l’image. Celle autour de la préservation et le partage des photographies du magazine LIFE en fait partie.

En effet, depuis 2008, des millions de photographies du magazine ont commencé à être mises en ligne par Time Warner et la firme Google. Celles-ci sont disponibles gratuitement. Je vous invite sincèrement à les observer, les lire attentivement et en retirer un certain apprentissage visuel.

Vous retrouvez ces images hébergées et classées à cette adresse : http://images.google.com/hosted/life

La relation entre cinéma et photographie

Partir du cinéma pour apprendre la photographie et inversement C’est un aspect qui m’obsède de plus en plus. Aujourd’hui, je vais commencer par un maître du genre : Stanley Kubrick.

Son travail autour de la perspective : un point de fuite central, un grand angle, une grande profondeur de champ, ce sont des éléments qu’on retrouve souvent dans les plans du réalisateur.

Kubrick-One-Point-Perspective-2 Kubrick-One-Point-Perspective-3 Kubrick-One-Point-Perspective-4Une explication plus détaillée (mais simpliste) dans cette seconde vidéo.

Deux manières de percevoir la photographie documentaire

La photographie documentaire et le photojournalisme ont des perceptions très diverses et variées. Chaque définition est propre à chaque photographe. Cela peut se jouer sur des subtilités comme sur une transcription entièrement différente. Lors des Rencontres Photographiques d’Arles 2011, deux agences avaient été invitées pour parler et confronter leur propre vision du métier de photojournaliste. J’avais eu la chance d’être présent lors de cette « confrontation » d’idées entre l’agence VII et le collectif Tendance Floue.

La vidéo que je vous propose est une mise en relation entre le point de vue Bertarnd Meunier (Tendance Floue) et Franco Pagetti (VII) autour la vision que ces deux regroupements se font du monde photographique.

La construction d’un projet photographique selon Howard Chapnick

Introduction

Photo de guerre emblématique d'un soldat américain tenant un bébé mort dans les montagnes de Saipan, 1944.© W. Eugene Smith/Black Star

La photographie passe par de multiples phases. De l’image facile où c’est le matériel le plus cher qui semble faire la meilleure photographie en passant par l’intérêt de construire sa propre démarche, il y a un monde et une maturation qui doit se réaliser.

Pour le moment, je me situe dans une phase de remise en question où l’envie de construire un projet photographique concret me taraude chaque jour.

L’article qui va suivre n’est pas une recette miracle et ne se veut pas une loi gravée sur une pierre d’argile. Dans ma phase de recherche et de compréhension des démarches photographiques, je suis tombé par hasard sur quelques citations extraites du livre d’Howard Chapnick : « Truth Needs No Ally » que j’ai dévoré dans le recueil du photographe Steve Simon « Passion photographique : S’inspirer de la photo de reportage pour se dépasser« .

Les 9 points qui vont suivre font partie d’une réflexion globale pour permettre une certaine maturation chez le photographe désirant se lancer dans un projet / essai photographique.

Ce n’est pas une recette miracle mais elle a le mérite de me faire réfléchir depuis que je l’ai lue. Je profite donc de ce blog pour vous la partager en retour. Evidemment, cela demande avant tout une ouverture et un engagement de la part du photographe.

H.Chapnick était un journaliste humaniste reconnu de ses pairs. Il va de soi que son essai se porte sur une photographie de type documentaliste mais qui peut se transposer à de nombreux projets divers et variés.

Howard Chapnick - Fondateur de l'agence Black Star

La construction d’un essai photographique

Point 1. Le point de départ doit être une idée concise, réalisable, quantifiable et convaincante d’un point de vue journalistique. L’idée sera traduisible visuellement.

Point 2. Le sujet photographique aura de la profondeur et présentera une diversité de situations. La redondance visuelle devra être évitée. Chaque photographie apportera une dimension nouvelle ainsi que de nouveaux éléments de compréhension du sujet.

Point 3. Rien ne se fait en un jour. Se lancer dans un essai photographique demande du temps. En effet, il est important de prendre le temps d’explorer toutes les facettes du sujet. Il faut du temps pour repérer les redondances, les conflits visuels ou éléments conflictuels à l’intérieur du reportage doivent se révéler par eux-mêmes.  Il faut également du temps pour permettre au photographe de s’immerger dans son sujet et de le comprendre peu à peu.

Point 4. Un projet photographique demande de la coopération. Les personnes étant l’objet du reportage doivent être informées dès le début du projet qu’il leur sera beaucoup demandé. Le photographe précisera avec justesse qu’il risque de s’immiscer dans leur vie privée pour approfondir son sujet.

Point 5. Si le reportage s’axe sur un personnage précis, il est important de révéler sa personnalité, y compris ses défauts. La manière d’aborder sera honnête et la réalité ne sera pas de la poudre aux yeux.

Point 6. La réussite d’un projet photographique dépend du texte qui a le devoir d’amplifier le propos, éliminer les ambiguïtés visuelles. Les photographies et les mots formeront un ensemble qui se complètent.

Point 7. Il faut du temps et prendre ce temps permet de mettre les préjugés et les illusions en pointillés. Se lancer dans un projet photographique peut se révéler être un voyage de découvertes dans lequel l’évolution du sujet est à l’opposé de l’idée que l’on se faisait.

(Anecdote de H.Chapnick à ce propos) : Le photographe Eugene Smith réalise un reportage sur le Docteur Albert Schweitzer. Au début, E.Smith pensait rencontrer le saint homme qu’il s’était imaginé. Au bout de plusieurs mois, il trouva Albert S. autocratique et pétri de faiblesses humaines.

Point 8. La réussite d’un projet photographique est l’attention que le photographe porte sur les détails. Le photographe doit avoir un plan en tête qu’il suivra durant la durée de son projet. La maturation de ce plan est importante car c’est celui-ci qui permettra d’éviter la redondance, de faire attention aux détails et d’aborder de nombreuses facettes différentes.

Point 9. La mise en forme final d’un projet photographique est une affaire personnelle. Elle ne peut pas être prise en groupe. L’échange est important ainsi que la prise de différents avis mais c’est le photographe qui décide ce que le reportage doit exprimer et comment il doit être représenté.

Qui est Howard Chapnick ?

Howard Chapnick - Couverture du livre : "Truth Needs No Ally"

Howard Chapnick est le fondateur de l’agence photo Black Star et est une légende dans le photojournalisme. Christian Caujolle, directeur artistique de la célèbre agence VU, le définit avec ces termes dans un article du journal français Libération en 1996 lors de la mort de H.Chapnick à 74 ans :

«  Il était pour l’ensemble de la profession une sorte de conscience. Humaniste, défenseur acharné des récits photographiques et intraitable sur la rigueur de l’information, il a fait émerger toute une génération de reporters parmi lesquels Anthony Suau, Dona Ferrato, Christopher Morris et les frères David et Peter Turnley.

Il enseignait régulièrement à l’université du Missouri où fut publié, en 1994, son livre de conseils aux jeunes photographes Truth Needs No Ally. « 

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La photographie mexicaine mise à l’honneur aux Rencontres d’Arles : partie 1

Graciela Iturbide / "Le bain de Frida", Mexico / Prix Hasselblad en 2006

L’un des axes principaux de cette année reste incontestablement le Mexique à travers la photographie et la vidéo. Cet article ne sera pas du tout exhaustif. Je ne m’étendrai pas sur l’influence et la mise en avant du travail de Gabriel Figueroa en tant que directeur photographique pour le cinéma mexicain.

J’ai également pris le parti d’omettre les réalisations de Graciela Iturbide bien que celle-ci soit considérée comme l’une des photographes mexicaines les plus remarquables du paysage contemporain international.

Je suis certain que les plus curieux d’entre vous ne s’arrêteront pas là et choisiront de parcourir les méandres du net pour découvrir les démarches de ces deux artistes cités précédemment.

Pour introduire cette première partie, je parlerai très succinctement d’un évènement majeur au Mexique. En plus d’une approche contemporaine, l’Espace Van Gogh accueille une exposition très complète sur la révolution mexicaine. D’un point de vue documentaire et autour de divers photographes anonymes ou identifiés, c’est un témoignage visuel mettant en scène une période de l’histoire mexicaine et de personnages mythiques tels que les portraits de Francisco Villa et d’Emiliano Zapata entre 1911 et 1915. Cette exposition regroupe de nouvelles vues de la révolution encore jamais exposées.

Enrique Metinides / Avenue Chapultepec 1979 - Adela Lefarreta Rivas est renversée par une Datsun blanche

Enrique Metinides – Atelier des Forges

Enrique Metinides est mis en avant par un ensemble de témoignages photographiques sous une série nommée « 101 tragédies ». Durant sa longue carrière, il a parcouru les rues, la tristesse, les accidents, le courage des sauveteurs ou la curiosité malsaine des passants. Sa série est un témoignage des drames et faits-divers mexicains : pendaison, meurtre, accident de voiture, amputation ou noyade pour ne citer qu’eux.

De manière personnelle, c’est une réelle froideur qui se dégage de des images. Certaines m’ont déstabilisé ou choqué mais ce qui est certain, c’est que je ne suis pas ressorti indifférent de son exposition même si je n’apprécie pas cette approche presque médicale du malheur d’autrui et de la curiosité dérangeante des badauds.

Dulce Pinzon / Wonder Woman : Maria Luisa Romero, de l'Etat de Puebla. Elle travaille dans une laverie à Brooklyn. Elle envoie 150 dollars par semaine à sa famille

Dulce Pinzon – Ateliers des Forges

Dulce Pinzon / Harvey Birdman : José Rosendo de Jesus, de l'Etat de Guerrero. Il travaille comme organisateur syndical à New York. Il envoie 700 dollars par mois à sa famille.

« La véritable histoire des super-héros » est une série qui m’a vraiment fait réfléchir et prendre conscience de personnes oeuvrant au bien être d’autrui dans l’indifférence totale de la société. Autour d’une vingtaine de photographies, Dulce Pinzon va mettre en avant les immigrés mexicain à New York qui sont de véritables héros oubliés. En effet, ceux-ci travaillent de très longues heures dans des conditions très difficiles pour un salaire misérable dans le but d’envoyer de l’argent à leur famille restée au Mexique.

Mis en scène dans des costumes de super-héros dans leur lieu de travail, les photos de ces immigrés latino-américains sont accompagnées d’une légende qui permet au lecteur de prendre conscience de la métaphore visuelle proposée. Un véritable coup de coeur pour ma part sur ces super-héros anonymes mais indispensables à la société.

Daniela Rossell / Ricas y Famosa - Riches et célèbres

Daniela Rossell – Ateliers des Forges

La série « Ricas y Famosas » de Daniela Rossell semble si détachée de la réalité dans des poses, des décors et des attitudes travaillées autour d’une certaine luxure emprunt d’une touche à la limite du « kistch » volontaire. En travaillant cette série, elle met en avant le quotidien, l’identité et le monde imagé que s’est créée la nouvelle bourgeoisie mexicaine.

Ces femmes ont accepté de mettre en scène leur richesse tout en acceptant indéniablement l’image véhiculée comme une illusion de leur propre réalité. Cette série veut montrer la manière dont ces femmes veulent réellement vivre dans une sorte de fantasme et de réalité exubérante.

En 1999, Daniela Rossell nous éclaire sur les protagonistes mises en avant : « Ces images dépeignent des scènes actuelles. Les sujets se représentent eux-mêmes. »

Maya Goded / Frontières USA - Mexique. Quartier des prostituées, série "Bienvenue à Lipstick", décembre 2009

Maya Goded – Ateliers des Forges

Avec « Bienvenue à Lipstick » et « Terre de sorcières », Maya Goded plonge le lecteur dans une danse extrême où la femme vit dans une détresse quotidienne. La première série a été réalisée près de la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis dite « zone rouge ». Endroit anarchique où la violence, le sexe et la drogue enfoncent de nombreuses femmes dans une lutte difficile mais obligatoire au maintient de la vie de cette zone.

La seconde série s’est réalisée dans la durée dans le nord du Mexique. Depuis l’invasion espagnole, la religion catholique a envahi ces contrées en changeant les règles spirituelles et sociales du pays. La persécution des femmes dites chamanes soupçonnées de sorcellerie en est une des nombreuses conséquences. Malgré cela, les croyances indigènes restent encore bien présentes dans les campagnes mexicaines. Craintes et respectées, le destin de ces femmes reste toujours l’isolation et l’exil.

Un coup de coeur qui me pousse à m’intéresser de manière plus approfondie à cette photographe courageuse.

Maya Goded / La Huasteca Potosina, San Luis Potosi, Mexique, Série "Terre de Sorcières", 2006

Les différentes parties proposées dans ce dossier sur « Les Rencontres d’Arles 2011″

La Kodachrome : la pellicule couleur qui a changé le support photographique

Avec la fin du Kodachrome en décembre 2010, il me semblait intéressant de revenir sur l’histoire de cette pellicule de légende qui a changé le visage de la photographie !

C’est le 30 décembre 2010 que la firme Kodak a enterré de manière officielle le film Kodachrome. Le dernier laboratoire au monde à prendre en charge le développement de ce type de film a traité son dernier film fin décembre 2010.

L’histoire de ce film photographique me paraît incontournable à aborder pour ceux qui aiment la photographie et son évolution au cours des 50 dernières années. Je ne me tromperais pas en disant que la Kodachrome est la révolution couleur auprès du grand public !

Ce film légendaire est lancé en 1935 par deux musiciens. La Kodachrome révolutionnera la couleur auprès du grand public. Avec des contrastes particuliers et un système de développement unique par rapport aux autres films photos, les photographes devront faire appel à des labos spécialisés pour développer leur négatif. La Kodachrome est reconnue pour sa qualité optimale au niveau de la finesse de son grain. Ce qui en fera une utilisation intensive dans l’archivage par exemple.

Au début des années 90, 25 labos dans le monde avaient la charge de traiter ce film au processus de développement si particulier. Mais comment développer un film dans ces conditions me direz-vous ? C’est là toute l’ingéniosité du processus contrôlé par Kodak et qui paraît inconcevable en 2010 : envoyer la pellicule dans une enveloppe fournie sans la sceller. Le forum Nikon Passion l’explique d’ailleurs en ces termes :

Il suffisait de glisser la pellicule dans l’enveloppe jaune livrée avec le film, de la fermer avec l’agrafe métallique et la boîte de dias vous revenait quelques jours plus tard à domicile. Le développement et le retour par la Poste étaient en effet inclus dans le prix du film.

Pour aller plus loin encore, il est prouvé que la Kodachrome proposait un rendu presque inégalé avec des appareils numériques actuels ! De manière simpliste et dans les conditions optimales de matériel, ce film propose un détail de plus de 25 mégapixels.

Steve McCurry / Magnum

Le secret du succès

En plus d’une qualité indéniable encore aujourd’hui face au matériel grand public et semi-pro, la Kodachrome a un rendu très pointu des couleurs et de la lumière. Comme déjà dit précédemment, la Kodachrome est le premier film couleur à rencontrer le succès auprès du grand public. De part cette réussite, ce film a réellement changé la vision de la photographie.

Steve Mc Curry est un photographes les plus représentatifs de l’utilisation de la Kodachrome. Pour la petite histoire, il reçut la dernière pellicule fabriquée par Kodak en 2009, suite à l’annonce de la firme de l’arrêt de production de ce film. L’une des photographies les plus célèbres de l’histoire a été réalisée avec le film Kodachrome. Comme quoi le hasard, fais bien les choses !

Steve Mc Curry – Kodachrome / Afganistan

David Seymour – Exposition à Bruxelles

Une rétrospective sur David Seymour est proposée à Bruxelles au Musée Juif de Belgique du 29.10 au 27.02.2011 avec l’aimable soutien de l’agence Magnum Photos.

Regard humaniste sur le monde, Robert Capa décrivait son compagnon avec ces mots : « C’est lui le vrai photographe ! ». Son autre ami Henri Cartier-Bresson ne pesait pas ses mots en stipulant que « Sans lui Magnum n’aurait jamais existé ».  Deux phrases qui en disent long sur l’importance de David Seymour dans l’histoire de la photographie.

La particularité de David « Chim » Seymour

Déjà en 1932, travaillant pour le magazine de gauche Regards, David Seymour parvient à imposer sa vision humaniste dans les reportages qu’il propose à la rédaction.  Ses photographies donnent un visage aux revendications des grévistes, des manifestants et des dirigeants du Front populaire.

Lorsque Franco lance un coup d’Etat qui plonge l’Espagne dans une guerre civile sans précédent, Chim sera l’un des premiers photographes sur place. Loin de l’action, David Seymour reste à l’arrière et dénonce le sort des petites gens. Il décrit le quotidien de la vie sur place en proposant des photographies très humaines.

Après la défaite des républicains en Espagne, il va accompagner les fugitifs qui trouvent exil au Mexique. De part ses photographies, il va soutenir les paysans, montrer la vie de la population sans voyeurisme.

L’un de ses plus grands reportages, à mon sens, est une prise photographique dans l’Allemagne qui se reconstruit après la guerre : un couple qui cultive un potager au pied du Reichstag en ruines, des scènes de la vie quotidienne et le procès des anciens chefs du camp de concentration de Buchenwald. Ce reportage porte le nom de We went back.

En 1948, pour l’Unicef, il accepte un reportage sur les conditions de vie des enfants en Pologne, Hongrie, Autriche, Italie et Grèce.  Il offre un regard attendri, plein de compassion et humain sur cette génération victime de la deuxième guerre mondiale. Il se rend dans des camps de réfugiés, sanatoriums, hôpitaux, orphelinats, écoles ou crèches. Chim va essayer de comprendre tous ces enfants et va se placer à leur hauteur pour permettre au spectateur de partager leur univers et leur vision du monde.

David Seymour est touché par la misère des enfants. Il saisit la détresse de Teresa qui a grandi dans un camps de concentration en Pologne par exemple. La photo ci-dessous met en avant le regard de cet enfant qui témoigne de tous les souvenirs qui la hanteront à jamais.

Pologne. 1948. Teresa, qui a grandi dans un camps de concentration, dessine sa maison sur le tableau noir. David Seymour / Magnum Photos

Dans les années 1950, David Chim Seymour va se séparer des lourdeurs de la guerre. La société est en phase de mutation et les populations veulent rêver d’autre chose. Chim va alors à la rencontre des personnalités naissantes telles que Sophia Loren, Audrey Hepburn ou Kirk Douglas. Loin des photographies banales, David Seymour va s’installer dans leur intimité avant de réaliser les portraits et c’est par cette démarche qu’il va présenter l’être humain qui se cache derrière la star.

Avec la mort de son ami Robert Capa en 1945, David Seymour est très affecté par cette nouvelle. Il s’investira corps et âme dans l’agence Magnum. En parallèle, il retournera sur le terrain en photographiant la Grèce mais son coeur se tournera vers Israël. Juif de naissance, Chim se réjouit de la création d’un Etat juif. Il s’y rendra chaque année avec le désir de témoigner de cette nouvelle réalité. Il relatera l’immigration, l’intégration et la vie quotidienne de ces colons.

David Seymour parle longuement avec ses interlocuteurs avant de les mettre sur pellicule. Le contact humain est la base de l’humanité qu’il fait transparaître dans ses images. Il se tournera vers les plus vulnérables tels que les ouvriers, vieillards, femmes et enfants.

Sa vie s’arrêtera en 1956 en Egypte. Il réalise un reportage sur l’affaire de Suez et tombe sous les balles d’un soldat de Nasser. Il se préparait à réaliser un reportage sur un échange de prisonniers après la signature du cessez-le-feu.

Qu’avons-nous à y apprendre ?

Le Musée Juif de Belgique propose une exposition remarquable. Je me suis surpris à ressentir une véritable émotion en observant le reportage commandé par l’Unicef. Enfin une photographie qui rend une dignité aux protagonistes mis en scène. J’y ai ressenti l’humanité et le respect de l’autre. Cela est très important à mes yeux.

Notre société s’enfonce de plus en  plus en loin dans le voyeurisme malsain. Le sensationnel, les images chocs, une banalisation de la gravité des images couplées à la surabondance engendrée par le numérique dénaturent complètement l’Homme. Evidemment, la généralisation n’est pas de mise mais de plus en plus nos images sont vides de compassion.

La collaboration entre la commissaire d’exposition Andréa Holzherr et Magnum Photos est très profitable. Entre les images, j’ai pris le temps d’observer les différents témoignages papiers proposés dans les vitrines ou une inspection minutieuse du Leica de Chim.

Les textes explicatifs sont courts et vont à l’essentiel. Loin des grandes phrases, les écrits donnent une véritable dimension aux images et au contexte historique. La lecture est donc indispensable à la compréhension de l’oeuvre.

Cette exposition est donc une réussite à mes yeux et il me paraît inconcevable de la rater si vous passez sur Bruxelles.

FRANCE. Paris. The photographers David SEYMOUR « Chim » (left) and Robert CAPA. 1952.